LightBlog

Hémolyse et son exploration

Définition

L’hémolyse est la destruction des GR arrivés au terme de leur vie circulatoire de 120
j, et la conséquence de la libération puis du catabolisme de l’hémoglobine qu’ils contiennent.
Les globules rouges (GR) vieillis disparaissent du torrent circulatoire par un
mécanisme intra tissulaire (85%), et pour une petite partie par hémolyse dans le torrent circulatoire (15%). L’hémolyse pathologique amplifie l’un ou l’autre de ces 2 mécanismes.




1. Production érythrocytaire et érythropoïèse inefficace  physiologique.

Chez le sujet sain environ 15% de l’érythropoïèse n’aboutit pas à la production de GR : les érythroblastes défectueux sont éliminés (phagocytose par les macrophages médullaires) et leurs composants sont dégradés (ADN dégradé en acide urique, Hb dégradée en libérant
le fer qui sera recyclé et en hème qui sera catabolisé en bilirubine)
En pathologie l’érythropoïèse inefficace peut devenir majeure : les dysérythropoïèses constitutionnelles (congénitales, hémoglobinopathies) ou

acquises (carences en B12 ou en folates, syndromes myélodysplasiques) aboutissent à une destruction excessive d’érythroblastes défectueux (= avortement intramédullaire), et une faible production de réticulocytes et de GR.
Toutes ces situations ont en commun une anémie non ou peu régénérative (Nb de
réticulocytes normal ou diminué) et des signes d’hémolyse intra tissulaire excessive (LDH et bilirubine libre augmentées ; voir plus loin)

2. Vie et mort du globule rouge.

2.1. Mesure de la durée de vie du GR.

2.1.1. Méthode isotopique avec production d’hématies jeunes radiomarquées.

On injecte un composé radioactif (glycine marquée au 14C ou au 15N, ou 59Fe) qui est
utilisé par l’érythropoïèse. Pour le 59Fe (voir « métabolisme du fer ») : après injection intraveineuse, le fer radioactif disparaît rapidement du sang (1/2 vie = 90’), est capté rapidement par les érythroblastes, avec une radioactivité médullaire maximale après 2-4 j).
Ensuite la radioactivité apparaît dans le sang (=GR avec Hb marquée au 59Fe). Cette
radioactivité persiste environ 100-120j dans le sang, puis disparaît. A l’état normal environ 70-75% du radiofer injecté est retrouvé dans les GR. Des capteurs placés sur le sacrum ou la rate ou le foie permettent de mesurer l’importance de la captation de radio fer par ces organes (importance en pathologie pour localiser une captation excessive, par exemple splénique).


2.1.2. Marquage isotopique des GR circulants.

Un volume de sang est incubé avec un sel de chrome radioactif qui se fixe à l’Hb.
Après lavage on réinjecte les GR marqués (qui se mélangent aux autres GR). On mesure régulièrement la radioactivité d’un aliquote sanguin, qui diminue progressivement et disparaît vers 120j. Par rapport à la technique au radiofer, on marque ici les GR circulants de tous âges.
En pratique une correction de la mesure est nécessaire car les GR relarguent une
partie du chrome marqué : la ½ vie moyenne des GR normaux par cette méthode est de 30j,
avant correction (voir courbe ci-dessous). Des capteurs placés sur divers organes apprécient une éventuelle captation excessive.
       A retenir : selon les méthodes de mesure, la vie du GR varie entre 115 et 125 j.

2.2. Vieillissement des GR.

Plusieurs hypothèses sont proposées pour expliquer la fin de vie des GR après environ 120j, mais aucune n’est prépondérante ni clairement démontrée.
Les GR étant dépourvus d’appareil de synthèse, il a été proposé qu’une diminution
progressive de l’activité des enzymes érythrocytaires puisse diminuer la protection de la membrane et l’hémoglobine contre l’oxydation irréversible. La présence d’Hb oxydée (corps de Heinz) faciliterait leur phagocytose par les macrophages de la rate. Mais cette diminution d’activité est faible si l’on compare les GR jeunes et âgés (sauf les réticulocytes qui ont une forte activité enzymatique).
Modification des flux ioniques, avec augmentation du Ca et diminution du
potassium intracellulaire, induisant une déshydratation et une diminution de la
déformabilité (diminution de l’activité des canaux calciques).
Diminution de la charge négative de la membrane, par perte progressive d’acide
sialique sur la partie externe des glycoprotéines membranaires, facilitant la phagocytose par les macrophages.
Hypothèse immunologique. Présence de faibles quantités d’Ac anti protéine bande
3 et anti glycolipides, se fixant préférentiellement sur les GR âgés, facilitant leur phagocytose par les macrophages.

2.3. Hémolyse intra tissulaire.

Prépondérante à l’état normal (85%), elle est assurée par les macrophages de la moelle osseuse, de la rate et du foie. En pathologie les GR légèrement altérés seront plutôt
phagocytés dans la rate, alors que fortement altérés ils le seront aussi bien dans la rate que le foie.
Transformation de l’hème en bilirubine.
- L’hémoglobine est dissociée en hème et globine, et la globine est dégradée
(catabolisme des protéines)
- l’hème perd son atome de fer (qui sera stocké dans les macrophages ou recyclé, surtout dans l’érythropoïèse) et est dégradé par l’hème oxydase et un processus autocatalytique qui produit de la biliverdine (structure tétrapyrrolique encore fermée), puis la bilirubine (ouverture de l’anneau tétrapyrrolique et formation d’une structure linéaire).
- La bilirubine est dite « libre » : elle est insoluble dans l’eau et soluble dans les graisses.
Libérée hors des macrophages, elle est véhiculée dans le plasma par l’albumine, qui la transporte jusqu’aux hépatocytes.
- Dans les hépatocytes elle sera glycuroconjuguée (2 molécules de glycuronide /
molécule de bilirubine), ce qui la rend soluble; elle est ensuite excrétée par la bile dans le duodénum où elle est transformée en stercobiline (éliminée dans les selles) et en urobilinogène et urobiline dont une partie (15%) est réabsorbée (cycle entéro-hépatique) et finalement éliminée dans les urines.
Valeurs normales : bilirubine libre < 10 mg/l ou < 17 μmol/l
bilirubine conjuguée < 3 mg/l ou < 5 μmol/l
En pathologie :
- Hémolyse : augmentation de la bilirubine libre
- Pathologies hépatiques : augmentation uniquement de la bilirubine libre, ou des deux (libre et conjuguée)
Remarque : les techniques de dosage de la bilirubine utilisent un diazoréactif qui colore
directement la bilirubine conjuguée = bilirubine « directe », et l’addition d’un réactif alcoolique ou solubilisant est nécessaire pour colorer la bilirubine libre = bilirubine « indirecte ».
[- la bilirubine libre se solubilise dans les lipides du tissu cérébral où elle a un effet toxique (voir « maladie hémolytique du nouveau-né ») et induit un ictère nucléaire ; la photothérapie modifie la structure spatiale de la bilirubine libre et la rend hydro soluble.
- Il existe divers déficits enzymatiques de la voie de glycuroconjugaison ; le plus sévère est la maladie de Crigler Najjar dans lequel la bilirubine n’est pas conjuguée, entraînant une élévation excessive de la forme libre et un risque majeur d’ictère nucléaire
- une anomalie apparentée à la précédente mais asymptomatique hormis un discret
subictère est la maladie de Gilbert (touche 10% de la population mondiale)
- en dehors du catabolisme de l’hème en bilirubine, il existe d’autres voies de dégradation, toutes encore mal caractérisées]

2.4. Hémolyse intra vasculaire.

Représente environ 15% de l’hémolyse physiologique, par lyse osmotique des GR vieillis ou fragmentation (diminution de déformabilité) dans les capillaires de taille réduite.
Devenir de l’hémoglobine libre :
- Elle se fixe en premier lieu à l’haptoglobine (Hp = alpha2 globuline synthétisée par le foie).
Si la demi vie de l’Hp libre est de 4-5j dans le plasma, le complexe Hp-Hb est éliminé par les hépatocytes en < 30 minutes (les 2 protéines sont dégradées). L’Hp peut disparaître totalement du sang en cas d’hémolyse excessive.
Valeurs normales de l’haptoglobine : adulte = 0.7 – 2.5 g/l
[absente chez le NNé, sa synthèse est progressive et les valeurs normales sont
progressivement atteintes dans l’enfance]
En pathologie :
Hémolyse intra vasculaire : < 0.1 g/l
Hémolyse intra tissulaire : 0.1 – 0.5 g/l
NB : l’Hp est une protéine de la phase aiguë de l’inflammation, l’IL1 et l’IL6 augmentent fortement sa synthèse hépatique lors des états inflammatoires]
- En cas d’excès d’Hb libre dans le plasma, l’Hp plasmatique peut disparaître totalement.
L’Hb libre est alors en partie captée par les hépatocytes, et en partie dissociée en dimères alpha-bêta qui traversent le filtre glomérulaire rénal et sont partiellement réabsorbés. La réabsorption est limitée et aboutit à une hémoglobinurie et une tubulopathie (qui avec l’état de choc induit l’insuffisance rénale aiguë).
[les cellules épithéliales rénales ingèrent de l’Hb et la catabolisent, stockant le fer : après quelques semaines on peut visualiser ce fer dans les cellules desquamées du sédiment urinaire par coloration de Perls (= hémosidérinurie); utile lors de crises hémolytiques intermittentes ou pour apprécier des pertes de fer urinaire]
- Dans le torrent circulatoire l’hème peut se fixer à l’albumine et à l’hémopexine (bêta glycoprotéine synthétisée par le foie). Le complexe hémopexine – hème est capté par les hépatocytes : l’hémopexine est libérée du complexe et retourne dans le plasma tandis que l’hème est dégradé (Hémopexine = 0.5 – 1.5 g/l ; augmentation dans les états inflammatoires ; moins bon reflet de l’hémolyse que l’haptoglobine de part sa recirculation.

3. Le bilan d’hémolyse.

En cas d’hémolyse pathologique :
Cliniquement :
Pâleur, asthénie, dyspnée, ictère, urines rouges
Biologiquement :
- l’hémoglobine de l’hémogramme est :
normale = hémolyse compensée
diminuée = hémolyse non compensée par la régénération médullaire.
- On dosera des paramètres généraux :
bilirubine libre et conjuguée
hémoglobine libre plasmatique (N < 0,2g/l)
hémoglobinurie
haptoglobine sérique
LDH
Réticulocytes (la numération des réticulocytes commence à augmenter
environ 5 jours après début de l’hémolyse (atteindra parfois > 1000 G/L))
- On utilise quelques paramètres d’orientation :
test de Coombs direct
fragilité osmotique
étude de la morphologie érythrocytaire sur lame
expression des molécules CD55 et CD59 sur les GR ou les leucocytes
référence:
Benjamin BACHY (Interne en Biologie) & Marc ZANDECKI, octobre 2006





Hémolyse et son exploration Hémolyse et son exploration Reviewed by Admin on 09:35:00 Rating: 5

Aucun commentaire:

Fourni par Blogger.